La thèse étudie sous différences facettes l’intervention sociale et juridique réalisée par des acteurs associatifs auprès des demandeurs d’asile dans le contexte français. Cette politique d’accompagnement est présentée en tenant compte de ses insuffisances, car elle apparaît inégalement répartie et sous-dimensionnée par rapport aux besoins des personnes exilées. À partir d’une comparaison de plus de 10 associations, l’enquête a permis de distinguer sous forme d’idéaux types deux univers d’intervention. Le premier est celui des associations « opératrices de l’État » qui interviennent dans le cadre des politiques de l’asile par lesquelles elles sont financées. Il est alors issu de la transformation du monde associatif et de la nouvelle répartition public/privé, avec un éthos professionnel prédominant et une part importante de salariés pour réaliser les missions d’accompagnement social et juridique. Le second univers est celui des associations « compensatrices » qui interviennent à côté des politiques d’accompagnement des demandeurs d’asile pour tenter de combler leurs manques. Il se rapproche davantage d’une représentation plus traditionnelle des associations, dans la mesure où elles recouvrent de manière plus explicite les missions de médiation entre la société civile et les pouvoirs publics, recrutent majoritairement des bénévoles, et comptent sur l’engagement citoyen et militant des intervenants. Ces deux univers associatifs cohabitent dans le même secteur et partagent le même objectif de délivrer une aide à l’accès aux droits sociaux et aux procédures administratives à destination des demandeurs d’asile, malgré leurs univers moraux, leurs modes d’organisation et leur rapport à l’État différenciés. Prendre en compte cet écosystème associatif permet de mettre en exergue les effets du cadre d’intervention sur l’expérience vécue et les limites de l’aide apportée. Quelles représentations ont les travailleurs associatifs de l’asile, bénévoles ou salariés, de leur activité ? Comment perçoivent-ils le rapport à l’État de leur association ? Dans quelle mesure sont-ils confrontés à des injonctions au professionnalisme et comment le discours de la professionnalisation est-il lié aux profils de bénévoles et salariés ? Quels sont, in fine, les effets de ces univers associatifs sur la relation de face-à-face avec les personnes exilées ? La thèse propose de répondre à ces différentes questions par l’analyse d’un matériau de recherche varié : 98 entretiens avec des acteurs associatifs ou des personnes exilées, 3 années d’observation participante dans les associations du secteur de l’asile, et une enquête par questionnaire auprès de 223 travailleurs de l’asile, salariés et bénévoles. La première partie de la thèse replace la catégorie des demandeurs d’asile dans un contexte historique et présente ainsi les grandes évolutions des représentations et de la catégorisation des étrangers en France de la Révolution française à nos jours. La seconde partie interroge les enjeux de la spécialisation des associations autour des catégories administratives de l’asile. La troisième partie compare le rapport à l’État des associations et le niveau de politisation des intervenants. La quatrième partie s’intéresse au processus de professionnalisation des travailleurs de l’asile, qu’ils soient bénévoles ou salariés, et interroge la constitution d’un groupe professionnel dans ce secteur associatif. La cinquième et dernière partie de la thèse se concentre sur les enjeux de la relation de face-à-face, des limites institutionnelles aux limites individuelles et de la logique de don et contre-don à la gestion des émotions. Pour finir, cette partie ouvre la réflexion sur l’expérience vécue de la relation d’aide et sa réception par les personnes exilées elles-mêmes.
Mots-clés : Asile – Intervention sociale et juridique – Associations – Accompagnement
École Normale Supérieure
Bâtiment Oïkos
48 boulevard Jourdan
75014 PARIS