Cette thèse repose sur une enquête ethnographique par immersion dans la sociabilité quotidienne de jeunes ruraux de classes populaires. L’enquête se déploie dans les lieux qui segmentent ce groupe d’interconnaissance, du club de football aux foyers conjugaux où se réunissent les « bandes de potes » ou « clans » d’amis. Dans un premier temps, la thèse revient sur la socialisation juvénile et la polarisation entre précaires et stables à l’échelle de cette génération marquée par la crise de l’industrie locale, puis elle rend compte de la dispersion des jeunes au gré des différentes trajectoires scolaires et donc migratoires sur ce territoire soumis à un fort déclin démographique. Dans un deuxième temps, il s’agit de penser les logiques de distinction et de reconnaissance à l’œuvre entre ceux restés vivre en milieu rural. La prise en compte de la domination masculine est ici essentielle. Les inégalités au sein des couples – en capital économique, mais aussi d’autochtonie – se retrouvent en effet dans les sociabilités amicales. Enfin, la thèse montre comment, dans un contexte où les structures d’encadrement des classes populaires se disloquent, le fait d’avoir des amis « sur qui compter » est primordial, tant sur le plan de la respectabilité que pour s’insérer concrètement sur les marchés matrimonial et professionnel. Plus encore, l’analyse de la composition et du positionnement réciproque de ces groupes d’amis met en perspective leurs normes et sentiments d’appartenance. Elle permet notamment de penser la proximité que ces fractions des classes populaires plutôt « de droite » et sensibles aux discours du front national peuvent chercher à entretenir avec la bourgeoisie économique locale.
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