Cette enquête ethnographique porte sur le suivi longitudinal (entre 5 et 7 ans) de 20 étudiants résidant en Seine-Saint-Denis, issus de milieu populaire et d’origine immigrée. Elle se déroule en trois temps : un 1er moment en participation observante au lycée, organisé autour de 6 années d’enseignement dans le département ; un 2ème moment, du bac jusqu’au bac+3, où les lycéens se dispersent dans la voie normale (l’université), la voie médiane (IUT, STS) et la voie royale (classes préparatoires, Sciences Po, école de technologies digitales) ; un 3ème moment jusqu’au bac+5 et l’entrée dans la vie active. La thèse analyse les structures de déterminations et les relations d’opposition sociales par le prisme des individus, de la pluralité des scènes et de la temporalité. Les trajectoires biographiques et les carrières scolaires renseignent sur les conditions de possibilité de l’ascension sociale et la nécessité des ajustements qu’elle implique. Les nouvelles contradictions de la « démocratisation scolaire » apparaissent. Les épreuves les plus déterminantes se logent dans ce qu’intime la puissance des regards portés sur soi et la capacité à affronter le stigmate territorial, le mépris de classe, l’illégitimité culturelle, le racisme et les phobies engendrées par la pratique de l’islam. Elles renforcent la fragmentation d’un système inégalitaire où la quête d’un enseignement « approprié » remodèle la légitimité et la rentabilité du capital culturel, jouant contre l’intériorisation d’une dignité et d’une singularité acquises par l’acculturation scolaire – dans une tension entre reproduction et émancipation incitant à repenser le rapport pédagogique et la performativité du savoir.
École Normale Supérieure
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