À partir de la monographie d’une maison de Huautla de Jiménez, dans la Sierra Mazateca (État d’Oaxaca, Mexique), cette thèse cherche à montrer comment les individus appartenant à un même groupe de parenté utilisent et manipulent des codes identitaires variés en fonction des espaces auxquels ils ont accès. Les habitants de cette maison participent aux courses de chevaux locales et à la vente de cérémonies rituelles avec les champignons hallucinogènes aux touristes. Les hommes adultes occupent le devant de la scène dans les courses de chevaux, activité associée aux populations métisses, alors que les femmes âgées sont celles qui correspondent le mieux au modèle de chaman mazatèque « authentique » attendu par les touristes. Dans ces deux activités, les individus peuvent cacher ou exagérer les traits qui les identifient à une population déterminée. Ainsi, les acteurs participant à ces transactions évaluent les caractéristiques des objets et des personnes au centre des prestations. Les transactions elles-mêmes sont qualifiées d’échanges, de cadeaux, de paris, de fraudes ou de vols, en fonction du contexte et des individus concernés. L’enquête ethnographique s’accompagne d’un travail d’archives qui vise à montrer comment le récit de la rencontre entre le banquier américain Gordon Wasson et la guérisseuse Maria Sabina dans les années 1950 a fait de la consommation de champignons psilocybes un trait emblématique des Mazatèques et a contribué au développement du tourisme dans la région. Finalement, les possibles adhésions identitaires des différents membres de cette maison reflètent les relations asymétriques à l’intérieur de la famille, mais aussi à une échelle nationale, les hommes adultes étant plus facilement associés à la culture dominante métisse, alors que les femmes âgées sont plutôt liées à la culture ethnique et à une position subordonnée dans l’espace domestique.
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