Cette thèse porte sur l’expérience vécue des jeunes adultes pour qui le soutien familial fait défaut avant qu’ils aient stabilisé leur trajectoire d’intégration. Ce faisant, elle soulève deux enjeux. D’une part, en envisageant le passage à l’âge adulte comme un épisode biographique crucial, cristallisant la nécessité d’avoir à trouver sa place dans la société, tout en satisfaisant à l’impératif de réalisation de soi propre à l’individu contemporain, elle analyse la manière dont les individus se confrontent à cette épreuve. D’autre part, dans la mesure où la solidarité publique à l’égard des populations jeunes s’adosse moins à des droits sociaux qu’à des secours contractualisés, elle explore les stratégies et les enjeux identitaires qui se nouent dans l’interaction avec les logiques d’intervention.
À partir d’une analyse typologique des expériences vécues, ce travail invite à considérer l’hétérogénéité des liens sociaux, sources de protection et de reconnaissance, sur lesquels ces jeunes peuvent s’appuyer, mais aussi les mécanismes de compensation qui peuvent se jouer lorsque l’un de ces liens est fragilisé. Elle montre, en outre, qu’une partition de la vulnérabilité juvénile s’opère à travers le traitement social de ses difficultés. Les uns, en mesure de répondre aux exigences de la logique d’activation, bénéficient des dispositifs les plus protecteurs. Les autres, plus démunis du point de vue des ressources et des supports qu’ils peuvent mobiliser, et refusant les perspectives disqualifiées qui se dessinent pour eux, sont relégués dans le circuit de l’infra-assistance. L’apathie, l’agressivité ou le retrait, apparaissent, pour ces derniers, comme la seule façon de maintenir une position d’acteur.
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