Cette thèse porte sur l’évolution des relations entre les reporters de la presse quotidienne japonaise et les entreprises dont ils sont salariés. À la croisée de la sociologique interactionniste des professions, de la sociologie de la presse et de la sociologique économique, elle prend appui sur une enquête de terrain centrée sur la rédaction d’un grand quotidien national, l’Asahi Shimbun, le deuxième plus grand journal au monde de par le nombre de ses lecteurs. Le journalisme de presse au Japon est en effet organisé autour d’un élément central : l’entreprise de presse. De grandes entreprises s’occupent de la formation professionnelle et protègent les reporters de la concurrence, en les intégrant à leur marché du travail interne et en contrôlant l’accès aux sources permettant l’exercice de l’activité. En retour, elles attendent des reporters un engagement fort et l’acceptation d’une appropriation de leur travail par l’entreprise. Ces éléments forment la logique organisationnelle du journalisme japonais. Le premier objectif de cette thèse est de décrire les principaux traits de ce modèle, tout en montrant comment coexistent des éléments relevant d’une logique de métier. Le second est d’analyser les conséquences de deux grands mouvements. Propre à l’industrie de la presse, le premier concerne l’évolution du lectorat et les transformations éditoriales auxquelles procèdent les entreprises afin d’y répondre. Le second, qui touche plus largement le monde du travail japonais, renvoie aux transformations de la place de l’entreprise dans la société. Des observations menées pendant trois ans au sein de la rédaction du journal, des entretiens qualitatifs et l’analyse de données statistiques d’origine institutionnelle permettent d’analyser les carrières et la division du travail, et de voir par quelles évolutions concrètes se traduit l’effritement de la logique organisationnelle.
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